Sommaire > Origine du drapeau Québecois
 
 

 

 

 

 

 

 

 

Légende du sirop d'érable

 

Bien avant l’arrivée de Christophe Colomb, les tribus amérindiennes savaient comment recueillir la sève des érables et la transformer en sirop d’érable.
Et à leur tour, les Amérindiens ont appris à nos ancêtres à fabriquer le sirop d’érable.
Mais les Amérindiens, eux, comment ont-ils appris ?
 

Une des nombreuses légendes raconte qu'un petit écureuil grimpa le long d'un tronc d'arbre, mordit sa branche et se mit à boire.

Un Amérindien se trouvant au pied de cet arbre le regardait et se demandait pourquoi, puisqu'une source d'eau fraîche coulait tout près.

Il imita l'écureuil en faisant une fente avec son couteau ... surprise, l’eau qui s’en écoulait était sucrée !

Jusqu'alors, sa tribu ne trouvait du sucre que dans les fruits sauvages.

Et voilà qu’il existait un arbre qui pleure du sucre en larmes de cristal.

En plus, il venait de découvrir un remède contre le scorbut dont les siens souffraient souvent au printemps.

Tout ça parce qu'il avait regardé et imité un écureuil en train de se désaltérer avec la sève d’érable.

Une autre légende de la tribu MicMac raconte que par une journée de printemps, alors que le vent était encore frisquet, une vieille femme alla ramasser la sève des érables et, comme elle goûte meilleure chaude, elle en mit dans un pot qu'elle plaça au-dessus de son feu de teepee.

Fatiguée, elle alla s'étendre pour se reposer.

Lorsqu'elle se réveilla, le soir était déjà là. Dans le pot, elle trouva un sirop doré, clair et sucré.

CROYANCE POPULAIRE

Les premiers cris des corneilles annoncent l’arrivée du temps des sucres.

Les premiers cris des outardes annoncent la fin de la saison.

Si on entaille les érables lors du croissant de lune, la coulée est abondante.

Si l’érable coule trop vite au moment de l’entaille, la coulée ne durera pas longtemps.

L’apparition de l’oiseau des sucres signifie qu’il est temps d’entailler (bruant des neiges).

Cet oiseau est fréquent lorsque le temps d’entailler les érables est arrivé.

Les papillons des sucres annoncent la fin de la coulée.

C’est un papillon gris et blanc qui fait son apparition à la fin de la saison des sucres et qui se noie dans les chaudières d’eau d’érable.

Jean Cadieux, coureur des bois

 

Cet héroïque coureur fait don de sa vie pour sauver sa famille et ses amis de la nation algonquine.

 

Jean Cadieux était coureur de bois.

Il avait épousé une femme de la nation algonquine, Marie Bourdon.

Chasseur et trappeur, il traitait avec les Indiens et échangeait des fourrures contre des provisions et des produits manufacturés qui lui permettaient de passer l'hiver encabané au fin fond des bois.

Un jour de mai 1709, il descendait la rivière Outaouais avec quelques Indiens Algonquins et sa famille pour aller vendre des fourrures.

Les terribles rapides du Rocher Fendu ont de tout temps été un obstacle pour la navigation.

Les indiens et les coureurs des bois utilisaient, pour les contourner, des sentiers de portage qui permettaient de franchir ces obstacles naturels en transportant à dos d’homme, bateau et matériel.

Ces endroits de portages étaient des lieux idéaux pour tendre des embuscades.

Lors d'une halte aux portages des sept chutes à l'Île-du-Grand-Calumet, l'un de ses compagnons parti en reconnaissance et repéra un groupe de guerriers iroquois en embuscade dans le but de s'emparer des précieuses fourrures.

Pour échapper à cette embuscade, ils n’avaient d’autres choix que de franchir les rapides déchaînés et cela, sous une nuée de flèches !

Afin d'augmenter les chances de survie de ses compagnons et de sa famille, Cadieux décida avec un jeune guerrier algonquin de faire diversion et d'attirer les Iroquois loin des rapides pour permettre à sa famille et ses amis de les franchir en toute quiétude.

Tous se cachèrent au fond de leur canot en amont des rapides, prêts à partir au signal convenu, soit un coup de fusil, pendant que Cadieux et son compagnon tentaient une manœuvre de diversion. Une heure plus tard, Cadieux et son compagnon prirent les Iroquois à revers et les attirèrent loin des rapides.

Un échange de coups de feu s'ensuivit : c'était le signal qu'attendait les compagnons de Cadieux pour s'élancer dans les terribles rapides, sous l'œil médusé de quelques Iroquois qui n'en revenaient pas et qui étaient plus préoccupés à se protéger des assaillants que de tirer sur les fuyards.

Avec une dextérité hors du commun, les canotiers algonquins conduisirent les frêles esquifs d'écorce au milieu des flots rugissants, évitant tout contact avec les rochers qui auraient pu déchirer les écorces de bouleaux, ce qui les auraient conduit à une mort certaine.

Deux jours durant, ils naviguèrent à un rythme d'enfer et atteignirent enfin le lac des Deux Montagnes où ils trouvèrent refuge.

Ne les voyant pas revenir, trois de ses compagnons, après avoir mis famille et fourrures en sécurité, partirent à la recherche de Cadieux et de son compagnon.

Les Iroquois avaient fui l'île et les Algonquins trouvèrent un petit abri de branche vide près du portage des sept chutes.

Les guerriers algonquins partirent à la recherche de leurs compagnons, lisant les traces laissées par les agresseurs et assaillants comme dans un grand livre.

Le jeune algonquin avait été tué et, trois jours durant, les Iroquois avaient battu l'île à la recherche de Cadieux qui continuait à guerroyer, aussi insaisissable qu'une ombre !

Après deux jours de recherches infructueuses, ayant perdu tout espoir de retrouver Cadieux, ils découvrirent une croix de bois plantée en terre près de l'abri qu'ils avaient remarqué à leur arrivée.

Et là, à demi enterré, gisait le corps de Jean. Il tenait entre ses mains une longue écorce de bouleau sur laquelle, avant de mourir, il avait transcrit sous forme d'une complainte, son épopée.

Il avait réussi à échapper aux Iroquois, mais épuisé et affaibli par trois jours de guérilla et de privations, il avait vu revenir ses compagnons, mais sans trouver la force de les héler.

Il s'était préparé à la mort, creusant sa tombe et y plantant une croix après avoir composé sa complainte.

Il s'était ensuite enseveli avec ses dernières forces, attendant la mort en un lieu dit le Petit Rocher de la Haute Montagne.

La légende de Cadieux était tellement vivace que les coureurs de bois qui passaient sur l'Outaouais s'arrêtaient sur sa tombe pour prier, entretenir la croix et prendre un copeau pour leur porter chance.

Certains accrochaient à un arbre proche une copie de la complainte écrite sur une écorce de bouleau.

À l'entrée du village de l'Île du Grand Calumet, un parc et un monument ont été érigé en l'honneur de cet héroïque coureur de bois qui a fait le sacrifice de sa vie pour sauver les siens.

Pilotte, la petite chienne qui sauva Montréal

Un jour de 1641, une petite chienne errante et ne connaissant que les ruelles de Paris pour seules distractions, se sentait fort déprimée.

Que faire de cette journée qui s’annonçait encore une fois monotone ?

Elle en était là de ses réflexions, lorsqu’elle vit une drôle de charrette qui avançait lentement dans un tapage grinçant.

La voiture était surchargée et le pauvre cheval ne semblait avancer que grâce aux supplications des 6 hommes qui accompagnaient le convoi.

La première impulsion de la petite chienne fut d’aboyer, car elle était jappeuse.

Les hommes et le cheval l’ignorèrent.

Alors, elle se prit au jeu et escorta le convoi durant tout le jour.

Lorsque le convoi s’établit pour la nuit, la chienne passa la nuit à la belle étoile avec eux. Ce fut le début d’une aventure fantastique.

Elle continua à suivre le groupe, et une fois parvenue à Dieppe, la petite chienne embarqua avec eux à bord d’un vaisseau qui devait traverser l’océan pour se rendre au Canada.

Un bon jour, ils se retrouvèrent sur les eaux du Saint-Laurent dans une embarcation de fortune et remontant le fleuve vers l’Île-de-Montréal pour aller fonder Montréal, appelé autrefois Ville-Marie.

Cette petite troupe comprenait quelques femmes dont Jeanne Mance et avait à sa tête le colonel Paul de Chomedey, sieur de Maisonneuve, fondateur et premier gouverneur de Ville-Marie.

Faisant fi des rigueurs de l’hiver canadien, de la forêt inhospitalière, des difficultés d’approvisionnement et de communication, M. de Maisonneuve et ses compagnons s’établirent sur l’Île de Montréal.

Dès ses premiers jours sur le sol de la Nouvelle-France, la petite chienne montra une animosité imprévue à l’endroit des iroquois.

Le gouverneur l’ayant remarqué demanda comment on l’appelait. Comme on ne lui connaissait pas de nom, il décida de l’appeler " Pilotte ", du nom de ces poissons qui suivent les navires pendant des traversées entières et guident les requins vers les proies que ceux-ci ne voient pas.

On l’entraîna à dépister les iroquois qui ne cessaient pas d’épier et de harceler Ville-Marie.

Les guerriers iroquois se cachaient un peu partout autour des fortifications et abattaient, lorsqu’ils le pouvaient, un charpentier, un scieur de bois ou quelque colon travaillant dans les champs mis en culture près des fortifications.

Nuit et jour, Ville-Marie devait soutenir une guerre acharnée et incessante d’embuscades et de surprises.

Pilotte faisait sa ronde chaque jour avec d’autres chiens jusque dans la forêt et ne manquait jamais de dépister une bande d’iroquois cachés ça et là.

Elle était douée d’un instinct merveilleux pour les découvrir, exécutant son travail de patrouille avec une telle persévérance et tant d’intelligence qu’elle jetait tout le monde dans l’étonnement.

Chaque fois que les colons entendaient ses hurlements d’alerte, ils accouraient vers M. de Maisonneuve pour l’informer de la situation.

Le 30 mars 1644, Pilotte faisait sa ronde comme tous les matins.

Soudain, elle se met à aboyer et à hurler comme jamais auparavant et les autres chiens qui l’accompagnaient l’imitèrent.

Tous les colons accoururent vers M. de Maisonneuve lui disant : " Monsieur, les ennemis sont dans le bois d’un tel côté, ne les irons-nous jamais voir ? " Le gouverneur répondit brusquement : " Oui, vous les verrez, qu’on se prépare tout à l’heure à marcher, mais qu’on soit aussi brave qu’on le promet; je vais à votre tête ".

Après avoir confié le fort à M. d’Ailleboust, M. de Maisonneuve, à la tête de trente hommes, se dirigea vers la forêt.

Deux cents Iroquois bien embusqués les attendaient, divisés en plusieurs bandes.

Un féroce combat s’engagea. M. de Maisonneuve sortit vainqueur de cette escarmouche et devint un héros … mais il ne faut pas oublier que c’est aussi grâce à l’alerte donnée par la brave Pilotte que Montréal fut sauvée.

Que serait-il advenu de Ville-Marie si Pilotte n’avait pas flairé les 200 iroquois embusqués aux alentours du fort ?

L’histoire ne dit pas ce que devint Pilotte …

Jacques Lacourcière,
Histoire populaire du Québec Auteurs multiples,
Légendes du Canada français

La légende de Madeleine de Verchères

 

Madeleine de Verchères était fille de soldat.

Durant son enfance, les soirs d’hiver, elle avait entendu raconter les actes héroïques de Jeanne d’Arc, peut-être cela l’influença-t-elle ?

Son père, François-Xavier Jarret épousa Marie Perrot (alors âgée de 13 ans) à l’Île d’Orléans en 1669 et ils s’installèrent sur leurs nouvelles terres situées entre Sorel et Montréal, à Verchères.
Ils élevèrent une nombreuse famille de 12 enfants au bord du fleuve St-Laurent.

Madeleine y est née le 3 mars 1678.
À cette époque troublée, les attaques iroquoises étaient fréquentes.

Mais où commence la légende ?

C’était le 27 octobre 1692, Madeleine avait 14 ans.

Alors qu’elle se promenait aux abords de la Seigneurie, elle entendit tout à coup le vieux serviteur Laviolette crier : " Sauvez-vous, Mademoiselle, sauvez-vous, voilà les Iroquois ".

Les indiens sortis brusquement des bois avaient capturé ou massacré une vingtaine de gens travaillant dans les champs et se dirigeaient maintenant vers la seigneurie familiale.

Madeleine s’enfuit. Les Iroquois la poursuivirent.

L’un d’entre eux la saisit par un mouchoir qu’elle portait autour du cou.

Avec agilité, elle dénoua le mouchoir, le laissa aux mains de son ennemi et dans une course folle rentra au fort en lui claquant la porte au nez.

Elle barricada la porte et entraîna sur les remparts ses deux frères âgés de 10 et 12 ans.

" Combattons jusqu’à la mort ", leur dit-elle; " les gentilshommes ne sont nés que pour verser leur sang au service de Dieu et du roi ".

Pendant huit jours, avec ses deux frères et deux vieux serviteurs complètement terrifiés, Madeleine soutint la lutte contre 45 assaillants.

Elle se multipliait, se montrant tantôt d’un côté, tantôt de l’autre, demandant à un de ses frères et aux deux vieux serviteurs de tirer du canon et du fusil régulièrement sur les Iroquois leur faisant croire que le fort était bien gardé.

Au bout de 8 jours, M. De la Monnerie vint lui porter secours, " Monsieur, lui dit la jeune fille, soyez le bienvenu, je vous rends les armes ".

" Mademoiselle, répondit l’officier, elles en bonnes mains ".

" Meilleures que vous ne croyez " répondit Madeleine.

Sept ans plus tard, en 1699, pour recevoir une pension du Roi, Madeleine écrivit au Roi lui racontant ses exploits, ce qui allait donner naissance à la légende.

Il était d’usage à l’époque d’exagérer les faits pour avoir une plus grosse pension royale. Madeleine a-t-elle exagéré ?

Nul ne le saura jamais.

Un monument a été érigé à Verchères à la mémoire de Madeleine.

Le 8 septembre 1706, Marie-Madeleine Jarret de Verchères épouse Pierre Thomas Tarieu de la Naudière, Sieur de la Pérade.

Le couple eut 5 enfants. Le 8 août 1747, Madeleine est décédée à l’âge de 69 ans à Sainte-Anne-de-la Pérade.

La légende d'Alexis le Trotteur

 

Il était plus qu’une légende car les " anciens " se souviennent encore de ses exploits.

Il mourut le 12 juin 1924 à l’âge de 63 ans, frappé par une locomotive qu’il tentait de devancer.

Figure marquante de la région de Charlevoix et du Lac-Saint-Jean au Québec, le Musée d’histoire du Lac-Saint-Jean lui rend hommage et expose plusieurs objets lui ayant appartenu.

Au cours de sa vie, on lui donna toutes sortes de sobriquets : Alexis le Nigaud, le Cheval du Nord, le Surcheval, mais c’est sous le nom d’Alexis le Trotteur qu’il est le plus connu.

Ses prouesses à la course ont fait le tour du pays. Il pouvait voyager aussi vite à pied que ses contemporains à cheval ou en voiture.

Il gagnait même des courses contre les trains.

L’anecdote la plus connue veut qu’un jour, il se trouvait au quai de La Malbaie avec son père qui attendait le départ du bateau pour Bagotville.

Le bateau quittait le quai à 11h00 pour arriver à Bagotville à 23h00.

Alexis voulait embarquer avec son père, mais celui-ci refusa de l’emmener.

Alors Alexis lui dit : "Quand vous arriverez à Bagotville, je prendrai les amarres du bateau"

Et il fila.

Pour faire le trajet par le chemin de terre, il fallait compter 146 kilomètres.

Alexis retourna à la maison, saisit un petit fouet, se fouetta les jambes et partit.

Lorsque le bateau arriva à Bagotville, Alexis était sur le quai attendant son père.

Il avait couru la distance en moins de 12 heures.

On se demande encore d’où lui venait cette incroyable facilité à courir.

Mais qui était-il cet homme qui courrait plus vite que le vent ?

Alexis Lapointe vient d’une famille de 14 enfants, il est né le 4 juin 1860 à Saint-Étienne-de-Malbaie dans la région de la Charlevoix au Québec.

Son père exploitait une petite ferme et comme les travaux exigeaient beaucoup de bras, Alexis faisait mille travaux pour l’aider.

Dès son jeune âge, il développa un goût pour les chevaux et les courses.

Il se fabriquait des petits chevaux avec des bouts de bois et s’inventait des courses contre le vent.

Il aimait se mesurer à d’autres gamins.

Avant de courir, il se fouettait les jambes avec une branche et criait : " Hue! Hue ! ".

Et il partait comme une flèche, sautant par-dessus les obstacles et il gagnait toujours.

En grandissant, il devint un fameux joueurs de tours.

Il jouait de l’harmonica avec adresse et ce qu’il aimait par-dessus tout, c’était les veillées et les fêtes pour pouvoir danser.

Il quitta la maison familiale très jeune et exerça plusieurs métiers pour gagner sa vie, dont celui de constructeur de fours à pain.

À cette époque, toutes les maisons du Québec avaient un four à pain construit à l’extérieur.

Alexis excellait dans ce travail.

Ces fours à pain de forme bien ronde étaient fabriqués de branches d’arbres recourbées servant d’armature et une épaisse couche de glaise séchée lui donnait sa forme.

Il fallait voir Alexis piétiner la glaise dans l’auge avant d’enduire son four.

Il se fouettait les jambes et ses muscles entraient en action.

Une vraie machine à pilonner ! L’automne, il partait dans les chantiers (camp de bûcheron) et revenait au printemps.

Et là, il parcourait les veillées pour danser.

Il était infatigable, capable de danser des gigues pendant 5 heures d’affilée.

Alexis parsema sa vie de prouesses sans en tirer trop de gloire allant même jusqu’à se faire prier parfois pour participer à une course.

Il n’acceptait pas toujours les défis qu’on lui lançait, mais quand il courait, il gagnait. On venait de loin pour le voir.

Il rendait aussi des services contre un peu d’argent.

Par exemple, il allait chercher le courrier dans un dépôt postal sur une distance de 30 kilomètres et faisait ce trajet en moins d’une heure.

À qui voulait lui lancer un défi à la course, il répondait : " Tu peux pas courir plus vite que Poppé ! " Poppé, le cheval du nord, c’était lui.

Car voyez-vous, Alexis était un excentrique profondément convaincu qu’il aurait dû être un étalon et qu’il était né sous forme humaine par erreur.

Alors, que ce soit pour construire ses fours à pain, pour aller bûcher ou danser, jamais il ne marchait Alexis … il trottait ou courrait …

Auteur : Jean-Claude Larouche, Alexis le trotteur

Les légendes du pont de Québec

 

Que de mystères planent autour de ce pont !

La construction débute en juin 1901 pour se terminer avec l'inauguration officielle le 22 août 1919.

Entre ces 2 événements, l'effrondement d'un premier pont le 29 août 1907 où 76 ouvriers perdent la vie et une seconde catastrophe le 11 septembre 1916 avec 13 victimes lors de l'effrondement de la travée centrale.

 

La messe du diable

Il n'y a pas longtemps, le diable était fourré partout.

J'ai entendu raconter que lorsqu'ils ont bâti le pont de Québec, ils ont eu recours à lui.

Ils avaient bien de la misère.

Ils avaient fini de le faire et quand ils ont posé le dernier clou, le pont s'est abîmé à l'eau.

Ils étaient bien en peine.

C'est là que le diable est arrivé.

Ils ne l'ont pas reconnu mais ça s'est dit après que ce n'était pas d'autre que lui.

Cet homme-là est arrivé puis il a dit " Si vous voulez, moi je vais vous monter comment faire et votre pont va tenir debout. "

Mais il avait posé une condition: il fallait que l'âme de la première personne qui passe sur le pont lui appartienne.

C'était pas une petite condition mais ils ont accepté quand même.

Quand ce fut le temps d'étrenner le pont, ils se demandaient bien quoi faire.

Une chance, il y avait un curé qui était là.

Il a dit : "Je vais chanter la messe sur un bout du pont, puis de l'autre, vous allez envoyer un chien.

Le diable va venir pour s'emparer de son âme et quand il va voir que c'est un chien, il est probable qu'il va se passer quelque chose.

" Comme de fait, le chien est parti en courant vers l'autre bout du pont, puis quand le diable l'a vu arriver, il a voulu se sauver mais en voyant le prêtre, il a sauté à l'eau avec le chien.

 

Le pont du diable

On prétend que le pont de Québec aurait été construit par le diable en personne, déguisé en ingénieur.

Après avoir retrouvé des dizaines d'ouvriers aux membres brisés, suite à la première grande catastrophe, un drôle de personnage se serait présenté au contremaître pour lui proposer un marché.

Le supposé diable aurait promis un travail sans catastrophe à la condition que l'âme de la première personne à traverser le pont lui soit remise.

Sans trop y penser, le contremaître aurait accepté.

Comme prévu, tout se passe bien jusqu'au jour de l'inauguration.

Repensant à son marché, le contremaître, plutôt futé, aurait pris un énorme chat noir et l'aurait lancé sur le pont.

Arrivé au milieu, le chat aurait disparu subitement!

À l'endroit même, on n'aurait trouvé qu'un petit tas de poils et de sang.

On dit que le diable attend toujours pour se venger ...

 

En terminant, avez-vous entendu parler du mystérieux boulon d'or ?

On raconte qu'un boulon d'or aurait été fixé au pont lors de sa construction.

Plusieurs personnes auraient tenté de le retrouver, mais jusqu'à maintenant, il est resté introuvable ....

La légende du Rocher Percé

 

Il y a mille et une histoires entourant le magnifique Rocher Percé en Gaspésie.

Connaissez-vous celle de la belle Blanche de Beaumont et du chevalier de Nérac ?

 

Au temps où le Canada appartenait à la France, un vieux château de Normandie abritait une jeune beauté, Blanche de Beaumont.

Or, un beau jour de juin, Blanche, alors âgée de 16 ans, faisait la connaissance d'un jeune et bel aristocrate, le chevalier Raymond de Nérac.

Ce fut le coup de foudre de part et d'autre.

Bientôt, ils se voient aussi souvent que possible devant les parents, mais surtout dans leurs dos chaque fois qu'ils le peuvent … puis un jour, on les fiança.

Bonheur parfait ne peut durer, surtout dans les légendes.

Aussi la guigne survint-elle dans la vie des jeunes amoureux, et la guigne, cette fois, serait le Canada. Comment s'y prendre pour rendre des amoureux parfaitement malheureux ?

Parfois en les unissant, parfois en les séparant.

Le destin a une expérience et une intuition terrible en cette matière, à telle enseigne qu'il trouva immédiatement la solution la plus tragique: envoyer le plus loin possible le jeune chevalier, et le plus loin possible à cette époque, c'était le Canada, si vaste et si redoutable avec ses hivers et ses iroquois.

Donc, sur les ordres du roi, le chevalier de Nérac dut prendre un poste en Nouvelle-France pour combattre les féroces iroquois.

Adieu la douce vie en France, les plaisirs de la cour et la belle et adorable fiancée de Normandie.

Une fois en Nouvelle-France, le chevalier de Nérac pataugea dans la neige, se perdit dans les bois, combattit les iroquois, gela dans des cabanes mal chauffées, commanda des hommes qui n'obéissaient qu'à leur bon gré, tira ici et là du mousquet, enfin se rongea d'ennui et d'amour pour sa fiancée qui le hantait.

Pendant ce temps, Blanche de Beaumont se morfondait également dans l'attente de son bien-aimé, mais dans son château.

Vint le jour où elle ne peut plus supporter une telle situation.

Elle irait rejoindre son fiancé en Nouvelle-France et l'épouserait.

Une fois cette décision prise, elle ne pensa plus qu'à ce projet audacieux, mais n'en souffla mot à qui que ce fut, surtout pas à ses parents.

Elle attendait, sans trop y compter, une occasion propice, qui se présenta malheureusement.

Un bon jour, son frère vint au château annoncer que le roi l'avait prié de faire du service en Nouvelle-France.

Et comment refuser au roi une prière ?

C'est alors que Blanche s'ouvrit de son projet à ses parents et les informa de sa ferme intention d'accompagner son frère en Nouvelle-France.

Ces derniers, horrifiés, s'y opposèrent carrément.

Mais que peuvent les parents contre l'amour ?

Au début de l'automne, Blanche de Beaumont s'embarqua donc pour la Nouvelle-France avec son frère.

Vers la mi-octobre, leur navire croisait à la hauteur des côtes de Terre-Neuve et tous se réjouissaient à la pensée d'arriver bientôt au terme de ce long voyage.

Surtout Blanche de Beaumont, naturellement, qui avait si hâte de revoir son fiancé.

Par un matin de temps clair, la vigie annonça un navire à bâbord qui filait vers eux à pleines voiles.

Ce fut d'abord une grande joie sur le galion français, mais bientôt suivie par un sentiment d'horreur: ce qui venait vers eux avait maintenant toutes les apparences d'un vaisseau pirate.

Lorsque le capitaine se rendit compte qu'il s'agissait bien d'un navire pirate, il ordonna que tout l'équipage et tous les hommes valides du navire se regroupent.

On distribua les armes et chacun prit le poste qu'on lui assigna dans l'attente de l'abordage, qui fut d'ailleurs fort sanglant : coups de feu, croisements de sabres et d'épées, cris déchirants, lamentations horribles, massacre de boucherie.

Les Français, bien entendu, offrirent une résistance farouche et désespérée, mais les pirates étaient plus nombreux et mieux armés.

En bons pirates qu'ils étaient … sic!!! … ils tuèrent tout ce qui pouvait être tué sur le navire, sauf Blanche de Beaumont qu'ils réservaient à leur capitaine, saccagèrent tous ce qu'ils crurent bon devoir saccager et emportèrent avec eux tout ce qui leur tenta.

On transporta la jeune beauté sur le navire pirate, mais non sans difficultés, car elle se débattait comme dix et l'on avait reçu l'ordre de ne pas la molester: la moindre égratignure coûterait une tête.

On l'enferma dans une cabine et l'on plaça un pirate devant sa porte.

Le hublot de sa cabine était garni de barreaux.

Pas de fuite possible.

Elle était complètement à la merci de cette racaille.

Le capitaine des pirates avait donc beau jeu.

Il pouvait faire de la jeune fille tout ce qu'il voulait, selon son caprice.

Mais il était un bon capitaine de pirates … à certaines heures il va sans dire.

Alors, cette fois, au lieu de la violenter et de la violer, ce dont il était fort tenté d'ailleurs, il décida d'user de principes et de faire les choses en grand.

Il épouserait Blanche de Beaumont sur le navire, devant tout son équipage.

Il en ferait sa femme et la patronne du navire.

Les enfants qu'elle lui donnerait auraient du sang noble.

Un ex-moine, membre de l'équipage, officierait.

Ces respectables intentions devaient faire perdre au capitaine sa belle proie.

Lorsque Blanche de Beaumont sut ce qui l'attendait, elle se jura qu'elle ne deviendrait jamais l'épouse d'un pirate.

Tous les moyens seraient bons.

Aussi, quand l'équipage rassemblée sur le pont vit paraître Blanche de Beaumont s'avançant vers le capitaine et l'officiant sourire au lèvres, on s'étonna de cette transformation si extraordinaire.

Mais la jeune fille devait les étonner fort davantage, car juste au moment où elle allait arriver à la hauteur du capitaine et de l'officiant, profitant de la confiance et de la surprise qu'elle avait suscitées, elle fit brusquement demi-tour, se mit à courir et se jeta à la mer avant qu'on ait pu intervenir.

Ce geste inattendu cloua l'équipage sur place.

Quand on eut repris ses esprits, il était trop tard; Blanche de Beaumont avait définitivement disparu dans les profondeurs de l'océan.

Le capitaine regretta amèrement ses bonnes intentions: voilà ce que c'était que d'avoir des principes.

On l'y reprendrait à avoir de la conscience !

Quant à l'équipage, il fut, dit-on, vivement impressionné.

La superstition, commune chez ces durs, fit le reste.

Toute la nuit, le navire glissa dans un épais brouillard, traînant à la remorque mauvaise conscience.

Le lendemain, lorsque le soleil eut réussi à dissiper cette brume, l'équipage se vit devant une masse énorme: c'était le Rocher Percé.

Ce singulier rocher, semblant flotter près du rivage comme un navire à l'ancre, dégageait une menace mystérieuse et impitoyable.

Soudain les pirates, figés de terreur, distinguèrent à son sommet une espèce d'apparition voilée dans laquelle ils crurent reconnaître Blanche de Beaumont.

Puis brusquement, cette apparition abaissa ses mains vers le vaisseau dans un geste de malédiction et ce dernier, avec tous ses occupants, fut changé en un rocher dont on retrouve encore des vestiges aujourd'hui.

On dit que le chevalier de Nérac périt peu après aux mains des iroquois.

On dit encore qu'à certains moments, lorsque le Rocher Percé est enveloppé de brouillard, on croit parfois entrevoir la jeune fiancée qui hante les parages des désirs inassouvis d'un amour malheureux.

La légende de Jos Montferrand

 

Le Québec a vu naître plusieurs hommes forts tel Louis Cyr, le géant Beaupré … mais le plus connu de tous est sûrement Jos Montferrand.

En 1959, Gilles Vigneault en a fait le héros d'une chanson, chanson qui fut bannie des ondes radios au moment de sortie en raison de son langage coloré, Jos Montferrand.

 

Jos Montferrand (1802-1864) est né à Montréal dans le quartier Saint-Laurent.

Il passa à la légende grâce à sa force extraordinaire et à sa réputation de défenseur des droits des Canadiens français.

À 16 ans, il était déjà un colosse.

Suite à un combat sur le Champ-de-Mars entre 2 boxeurs anglais, l’un deux fut proclamé champion du Canada.

À la fin de ce combat, les organisateurs lancèrent un défi à la foule : - Qui veut disputer le titre au champion du Canada ?

Qu'il s'avance ! Jos Montferrand s’avança et chanta : - Co-co-ri-co ! faisant ainsi savoir qu’il relevait le défi.

Jos Montferrand ne porta qu'un seul coup de poing mais si bien appliqué qu'il battit l'Anglais.

Le lendemain son nom était sur toutes les lèvres.

Il passa une bonne partie de sa vie dans la région de l’Outaouais à l’emploi des marchands de bois comme contremaître de chantier, puis guide de cage.

Il s’efforça toute sa vie de faire régner l’ordre entre ces hommes qui n’étaient pas des enfants de chœur. En ces temps " rudes ", des querelles se déclaraient à tout moment, soit pour garder le contrôle d’un territoire ou tout simplement parce que les anglais et les irlandais s’en étaient pris à un français.

À cette époque, les bûcherons coupaient des arbres, les " chaîneurs " attachaient ensuite les arbres entiers un à l’autre formant ce que l’on appelait des " cages ".

Ces immenses radeaux, ou cages, étaient flottés par des hommes robustes, les " cageux ", sur les rivières en direction des scieries ou des ports.

Les difficultés venaient surtout des " chaîneurs ", leurs méfaits ne se comptaient plus.

Jos Montferrand allait d'un chantier à l'autre pour mater ces fiers-à-bras qui terrorisaient tout le monde.

Il se battait aux poings et en dernier recours, il se servait de son pied dévastateur qui lui donnait invariablement la victoire sur n'importe quel adversaire.

Un coup de savate et l’opposant ne tenait plus debout !

Tout le monde connaissait la force de Jos Montferrand et redoutait cette adresse qui lui permettait d'assommer quelqu'un d'un coup de pied.

Son plus grand exploit eut lieu sur le pont qui enjambe le gouffre de la Chaudière, entre la ville de Hull et Ottawa, lorsqu’il dû affronter une centaine de " chaîneurs " qui lui avaient tendus un guet-apens.

Sur les deux rives, les curieux accoururent pour voir le combat d'un seul homme contre cent.

Ils connaissaient presque tous Montferrand mais ils ne donnaient pas cher de sa peau devant tant d'adversaires.

Chaussé de ses lourdes bottes cloutées, il affronta courageusement les " chaîneurs " et la panique gagna bientôt le rang de ses attaquants qui ne cherchèrent plus qu’à atteindre la rive.

Seul contre cent, il avait déjoué ses adversaires.

La foule l'acclama.

Cette prouesse fit le tour du pays.

Jos Montferrand n'avait pas encore trente ans et il était célèbre.

Il se battit encore souvent, toujours avec le souci de prouver à la face du monde que les gens de sa race, les Canadiens de langue française, n'allaient pas supporter les affronts.

Bien sûr, il avait les muscles et la force pour le dire !

Ses exploits inspirèrent quelques-unes des histoires les plus invraisemblables.

En 1828, dans une auberge de Montréal, Jos marqua un jour d’un vigoureux coup de pied le plafond de sa semelle cloutée.

Cette auberge devint célèbre car on vint de partout voir cette curiosité.

La raison est qu’un soldat de l’armée britannique, le major Jones, affichait un tel mépris envers les Canadiens français que Jos n’eut d’autres choix que de relever le défi que celui-ci lui lançait.

L’infortuné major fût tout juste capable de regretter ses paroles car à chaque coup, Jos lançait : " Insulterez-vous encore les Canadiens français ?

" Une série de timbres canadiens de 1992 porte sur des héros populaires qui sont passés à la légende et comprend entre autres Jos Montferrand, ce célèbre héros folklorique, bagarreur et lutteur au cœur sensible et joueur de savate inégalé. . .

Auteur : Benjamin Sulte, Jos Montferrand

La légende de la Corriveau

 

On la disait d’une grande beauté, faisant commerce avec le diable et coupable d’avoir tué 7 ou 8 maris.

Je vous livre ici l’histoire, la plus exacte possible, de Marie-Josephte Corriveau, la plus belle fille des environs de Saint-Vallier, petit village situé à quelques kilomètres de Lévis.

 

Ce qui s’est réellement passé Un jour de printemps 1749, les paroissiens du petit village de Saint-Vallier se rendent joyeusement à l'église pour célébrer le mariage de la plus belle jeune fille des environs.

Le futur mari est l’heureux vainqueur dans une lutte où les plus beaux et les plus riches jeunes hommes du comté lui ont disputé la belle.

Ce couple vécut heureux pendant 11 ans.

La seule ombre au tableau peut-être est que le couple restera sans enfant au plus grand malheur du père de Marie-Josephte, habile charpentier du village.

Malgré sa grande beauté, elle a tout de même une réputation assez redoutable, elle est surnommée la sorcière de Saint-Vallier.

On la dit empoisonneuse de profession et faisant commerce avec le diable.

Elle détient, paraît-il, des formules de poisons foudroyants ou à effets lents dont elle aurait hérité de La Voisin, son ancêtre maternelle (La Voisin, Catherine Monvoisin, célèbre aventurière française et diseuse de bonne aventure qui fut condamnée à être décapitée et brûlée par Louis XIV en 1680).

Un matin, les voisins voient arriver la jeune femme tout échevelée et tout hébétée.

Elle raconte en sanglotant qu'elle vient de trouver son mari mort dans son lit.

Le défunt est populaire et il est sincèrement regretté.

Chacun manifeste ses plus vives sympathies à la jeune veuve.

Personne ne soupçonne la veuve tant sa douleur est évidente.

Pourtant, quand on la voit au bras de Louis Dodier et convoler en secondes noces 3 mois seulement après la mort de son premier mari, cela fait jaser.

Trois ans s'écoulent et les soupçons finissent par s'effacer les uns après les autres.

Le matin du 27 janvier 1763, on trouve le corps de Louis Dodier, son deuxième mari, dans son écurie, le crâne fracassé par ce qui paraît d'abord être les fers de son cheval.

Cette fois, la justice s'informe et l'enquête démontre que le malheureux n’a pas été frappé par le cheval mais par une fourche de fer retrouvée près de là.

On exhume le corps du premier mari et l'on constate que sa mort a été causée par du plomb fondu versé dans les oreilles, durant son sommeil sans doute.

Les preuves s'accumulent, tellement écrasantes contre la veuve, que personne n’a plus aucun doute sur sa culpabilité.

Durant le procès, un incident spectaculaire se produit tellement que l’avocat de la Couronne s’étouffe et en perd sa perruque.

Le père de Marie-Josephte, maintenant un vieillard à cheveux blancs, s’avance vers les juges, s'agenouille et en sanglotant dit : Arrêtez, messieurs ! Ne condamnez pas une innoncente.

C'est moi qui ai tué Louis Dodier.

Je suis le seul coupable; faites de moi ce que vous voudrez.

Fou de douleur suite au témoignage d'une certaine Isabelle Sylvain, et en ne voyant aucun moyen de sauver sa fille qu'il adore, il vient se sacrifier pour elle.

Marie-Josephte accepte froidement et sans broncher le " sacrifice " de son père. M. Corriveau est condamné à être pendu.

Quant à Marie-Josephte, pour complicité, elle est condamnée à recevoir 60 coups de fouet en 3 lieux différents : sous l'échafaud, sur la place du marché de Québec et dans la paroisse Saint-Vallier, à raison de 20 coups à chaque endroit.

Également, à être marquée à la main gauche de la lettre "M" avec un fer rouge.

La cour condamne également Isabelle Martin pour parjure lors de son témoignage et à recevoir, elle aussi, 60 coups de fouet dans les mêmes conditions que Marie-Josephte Corriveau, mais que la lettre à être marquée au fer rouge sur sa main gauche serait le "P".

Son père est mené à la prison à côté de sa fille qui, habitée par la joie d'avoir échappé à l'échafaud, ne daigne même pas lui jeter un regard de pitié et de reconnaissance.

Le supérieur des jésuites à Québec, le révérend père Clapion, est appelé auprès du condamné à mort pour recevoir sa confession.

Il est estomaqué d'apprendre que la fille du condamné et bel et bien coupable.

Suite à la confession du vieillard, le prêtre lui fait comprendre qu'il n'a pas le droit de sacrifier sa vie et de fruster les fins de la justice.

La vérité est révélée aux autorités et l'on est d'autant plus implacable pour la meurtrière qu'elle a lâchement consenti à voir son vieux père subir la pendaison à sa place.

Un nouveau procès a lieu et la sentence, cette fois est : Marie-Josephte Corriveau sera mise à mort pour ce crime, par pendaison, sur les plaines d'Abraham.

Son corps sera enchaîné et suspendu à l'endroit que le gouverneur croira devoir désigner.

Après l'exécution, on forge sur le cadavre de la suppliciée une enveloppe "de fer" que l'on suspend une quarantaine de jours au bras d'un immense gibet sur les hauteurs de Lévis.

Quelle chose effrayante que cette cage de fer qui se balance au vent pour les habitants de Lévis et les passants, toute cette histoire marque l’imagination des gens et devient vite sujet de légendes plus ou moins noires.

À une époque où les déplacements sont difficiles, les gens, pour un certain temps, n’osent plus passer par la pointe de Lévis et préfèrent se rendre à Québec par voie d'eau pour faire leurs achats et vendre leurs denrées.

Cela causa un tort considérable aux petits commerces et aux aubergistes de l'endroit.

Une nuit, quelques citoyens, moins superstitieux que les autres, détachent la cage de la potence et l’enfouissent le long du mur d'enceinte du cimetière dans un petit espace réservé aux suppliciés et aux noyés inconnus.

Cela reste secret et donne lieu là encore à de nouvelles rumeurs, le diable est venu chercher sa complice …

Au fil des ans, ce n’est plus 2 maris que La Corriveau a assassiné mais 7 ou 8 avec milles détails quant aux circonstances tragiques.

En 1849, la cage est découverte et fait parler d'elle à nouveau.

Elle est exhumée et offerte aux regards curieux des gens.

Cela dure une couple de semaines mais un beau matin, on s’aperçoit que la cage a disparue.

Elle était pourtant tenue sous clé dans le sous-sol de la sacristie.

Le diable l’a-t-il encore une fois enlevée ?

Non, le diable, cette fois s’appelle P.T Barnum (les cirques Barnum & Bailey).

Maintenant, ceux qui visitent le Boston Museum peuvent apercevoir une vitrine où l’on aperçoit une masse de vieilles ferrailles brisées, tordues et rongées par la rouille et le feu.

Une petite pantcarte porte cette inscription "From Quebec".

C'est tout ce qui reste de la fameuse cage de la Corriveau, sombre témoin de la barbarie d'un autre âge.

La roche pleureuse

 

Charles se réjouissait du printemps hâtif cette année-là.

Il pourrait ainsi être de retour plus tôt à l’Île-aux-Coudres, durant l’été indien, pour épouser la belle Louise.

 

En 1806, lors d’un printemps particulièrement hâtif, la grande débâcle avait libéré le Saint-Laurent et permis la circulation des bateaux beaucoup plus tôt que par les années passées.

Un jeune navigateur, Charles Desgagnés, songeait, en fumant sa pipe au bord du quai de l’Île-aux-Coudres, qu'il pourrait entreprendre plus tôt que coutume son voyage annuel vers l'Europe ou, comme il le disait lui-même, vers " les vieux pays ".

Chaque printemps, en effet, il remplissait son navire de bois équarri pour le livrer dans les chantiers maritimes d'Angleterre.

Il se réjouissait de la débâcle qui hâtait son départ, car il pourrait ainsi être de retour en octobre, vers le dernier temps doux, pour épouser la belle Louise, sa fiancée.

À la mi-mai, les cales de son trois-mâts étaient remplies et les provisions hissées à bord.

Il alla saluer sa vieille mère et partit vers la pointe de l’île, là où habitait Louise.

Il ne la trouva pas chez elle. Son père, un cultivateur bourru mais bon comme de la mie de pain, indiqua avec le bout de sa pipe l’extrême pointe de l'île.

Louise aimait s’y réfugier lorsqu’elle était triste.

Charles l'y découvrit bien.

Elle était assise sur une roche auprès de laquelle s'élevait un orme gigantesque.

Ne t'en fais pas, ma Louise, murmura tendrement le jeune homme, je serai de retour pour l'automne et, avant que ne finisse l'été indien, nous serons mariés.

Sur ces paroles, une affreuse corneille croassa et s'envola d'une des branches de l'orme où elle était perchée.

Quel mauvais présage !

Une corneille !

Cet oiseau maudit, compagnon du diable et ami des sorcières ! Louise pâlit.

Charles tâcha de ne pas laisser percer son malaise.

Mais une corneille qui croasse n'augure rien de bon !

Le jeune homme, pour conjurer le mauvais sort, prit la main de Louise et y mit un petit bouquet de fleurs sauvages qu'il avait fait pour elle.

Elle détacha le ruban rouge qui liait ses cheveux, l'enroula autour du bouquet qu'elle pendit à une branche du grand orme, au-dessus de la roche où elle était assise.

Sous ce bouquet, sous cet arbre, sur cette pierre, jura la belle Louise, je viendrai sans faillir guetter ton retour !

Ils s'embrassèrent alors sans entendre le claquement des ailes de la corneille, étouffé par le bruit des vagues qui s'échouaient sur la grève.

Le lendemain, au point du jour, Charles larguait les amarres pour l'Angleterre.

Sur la pointe de sa roche, Louise suivit longuement des yeux le navire qui était d'abord gros comme une montagne, puis devint grand comme une colline, et qui, enfin, se confondit à l'horizon.

L'été et ses trois saisons s'installèrent : celle des framboises, celle des fraises et le temps des bleuets.

Louise songeait à la décoration de la maison qu’elle irait habiter avec son futur époux et que son père et ses frères construisaient durant l’absence de Charles.

De la plus haute fenêtre du pignon, on pouvait apercevoir la pointe de l'île, la roche et l'orme où se balançait encore le bouquet, sec désormais.

C'est dans cette pièce certainement qu'elle installerait le ber de leur premier enfant !

À l'été succéda l’automne.

Il sembla à Louise que la forêt, avec ses couleurs chatoyantes, avait endossé pour elle un habit de noces !

Au temps des bleuets répondit celui du blé d’Inde et des épluchettes à n'en plus finir, puis le moment des pommes.

Nous étions à la fin septembre et le trousseau de Louise était terminé.

La maison était prête et il ne manquait plus qu'y résonnât le rire de Louise ou la voix de Charles.

Tout l'été, Louise était allée s'asseoir sur sa roche, auprès de l'orme, sous le bouquet, à la pointe de l'île.

Mais à présent que la date du retour approchait, elle y passait de longues heures, le regard scrutant le lointain.

Le soir, à la brunante, elle rentrait à pas lents chez son père.

Et l'été indien s'en fut !

Et octobre et l'automne s'en allèrent !

Et les volées d'outardes, après s'être attardées sur les battures, se regroupèrent et, bruyamment, passèrent au-dessus de l’Île-aux-Coudres !

L'horizon demeurait tristement solitaire : Charles ne revenait point...

Assise sur sa roche, Louise pleurait sans entendre le croassement moqueur de la corneille perchée à la cime de l'orme.

Au village, les rumeurs voyageaient vite.

Les maldisants suggéraient que Charles et son équipage étaient certainement allés courir la galipette à Londres!

Qui donc pouvait savoir vraiment ?

Seule sur sa roche, Louise pleurait et l'espoir était sa réponse.

Quand le temps se fut refroidi, que toute la végétation fut recouverte d'une épaisse couche de neige et que toutes les eaux du Canada furent gelées, Louise dut se contenter de scruter la mer par la fenêtre du pignon de sa maison déserte.

Battu par le nordet, on apercevait le ruban rouge du bouquet danser au bout d'une branche.

Ce fut un long hiver sans joie.

Lorsque les glaces fondirent, Louise retourna, à la pointe de l'île, assiéger sa roche et tourmenter l'horizon.

Elle racontait tout bas ses malheurs et elle appelait son amoureux.

Toujours elle pleurait.

Un beau soir de mai, un messager vint annoncer que Charles avait péri en mer.

Louise, poussa un cri et sortit de la maison en courant.

Depuis lors, nul ne la revit plus. Son père se rendit à la pointe de l'île, où elle avait coutume de s'attarder.

Anxieux, il s'assit sur la roche.

De sa voix forte il appelait sa fille : Louise, Louise, où es-tu ?

Louise, réponds à ton père !

Le silence, qui explique bien des choses, le silence expliquait au père de Louise qu'il ne reverrait jamais plus sa fille.

Une fée en effet, touchée par le chagrin de la pauvre fille, l'avait changée en source, en roche pleureuse, pour qu'à travers les flots, elle puisse, dans l'océan, retrouver et s'unir à son amant perdu en mer.

L'homme regarda le filet d'eau claire, cette petite source qu'il n'avait jamais remarquée auparavant, surgir de la roche et se déverser en mer.

Il s'y abreuva.

Au-dessus de la roche, pendu à un ruban rouge, un frais bouquet de fleurs sauvages, bercé par la brise, lançait dans l'air mille parfums exotiques.

Sur une branche de l'orme chantait maintenant un bel oiseau blanc.

Auteur Charles Le Blanc, Contes et Légendes du Québec,
Nathan, Paris, 1999, pp. 103 à 111

La légende de la Dame Blanche

 

Certains prétendent que son voile, emporté le soir de sa noyade, aurait donné naissance à la mince cascade coulant à l’ouest de la chute Montmorency.

 

Par une belle journée d’été de 1759, elle cours rejoindre son fiancé, brave et vaillant jeune homme au regard de braise.

Après les durs travaux de la journée, ils se rejoignent souvent en haut du Grand Sault (chute Montmorency), là où l’on découvre l’Île d’Orléans.

À la fin de l'été, une fois les récoltes terminées, ils s'uniront pour toujours.

À l’abri des regards, près de la chute, ils font mille et un projets d’avenir.

L’été bat son plein lorsque résonnent les premiers coups de tambours.

Le jeune couple doit se résigner à la séparation car on appelle le jeune soldat au combat.

Les Anglais veulent enlever cette nouvelle terre d’Amérique aux mains des Français.

Les femmes et les enfants vont se mettre à l’abri au fond des bois, emmenant bêtes et provisions.

Quant aux hommes, jeunes et vieux, ils restent au bord du fleuve Saint-Laurent pour défendre leur terre jusqu’au dernier souffle s’il le faut.

La flotte anglaise sillonne le fleuve.

Partout, on aperçoit les bateaux de Saunders, immobiles et canons pointés vers la côte.

Toute la colonie est sur le qui-vive.

La terrible bataille éclate au matin du 31 juillet 1759 au pied des chutes Montmorency, et qui emporte le courageux jeune homme.

Lorsqu’un commandant apprend la triste nouvelle à la belle, elle sent son âme se retourner.

On lui apprend que son fiancé a combattu avec bravoure, mais c’est bien maigre consolation pour un coeur qui aime.

Elle repense au fier jeune homme qui l’a quittée brusquement à l’appel des clairons.

Un soir de pleine lune, continue la légende, folle de douleur, elle revêt la robe blanche qu’elle avait préparée pour la noce, recouvre sa chevelure d’un long voile et se lance du haut des rochers surplombant la chute, là où tant de fois elle est venue avec son fiancé.

Le vent s’empare de son voile, le fait virevolter et le transporte au loin.

On ne revoit jamais plus la jeune femme, pas plus que son fiancé.

Encore aujourd’hui, à la pleine lune, les gens de l’Île d’Orléans peuvent apercevoir distinctement la belle de blanc vêtue, suspendue au-dessus des eaux, chevelure au vent, et qui semble chercher son fiancé dans les eaux de la chute.

Certains prétendent aussi que son voile, emporté le soir de la noyade, aurait donné naissance à la mince cascade coulant à l’ouest du torrent.

Auteur : Cécile Gagnon: Contes traditionnels du Québec

 


 
 
Catégorie : Pages Personnelles